La compétitivité dans le high-tech B2B/B2G

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Dans la technologie, la compétitivité est aussi importante que l’innovation:

  • Les clients, qu’ils soient publics ou privés, comparent rationnellement et avec attention le prix, la valeur et les coûts d’utilisation du produit ou du service qu’ils comptent acheter. On parle souvent de coût total de possession ou TCO pour Total cost of ownership
  • Ils sont bien rarement prêts à payer n’importe quel prix pour un produit, un service ou une solution, qu’elle soit innovante ou non
  • Les concurrents sont toujours à l’affût et peuvent réussir à rattraper leur retard et proposer aussi bien ou mieux pour moins cher

On risque donc tout autant de perdre pied sur un marché technologique par défaut de compétitivité que par absence d’innovation.

De quelle compétitivité parle-t’on?

Ceci explique que la compétitivité soit une obsession de tous les instants dans le high-tech B2B/B2G, tout autant que l’innovation. Mais de quelle compétitivité parle-t’on?

  • Dans les propos qui reviennent en boucle dans les médias et parfois ceux des pouvoirs publics, il est essentiellement question des coûts et plus particulièrement du coût de la main d’œuvre qui constitueraient le facteur ou le handicap clef en matière de compétitivité.
  • Dans les entreprises on parle le plus souvent également de coûts, et assez classiquement dans les divisions ou les filiale, des coûts de structure excessifs prélevés par le siège.
  • Dans les entreprises encore, on parle souvent de faire pression sur les fournisseurs pour améliorer la compétitivité en acheteant moins cher

La compétitivité serait alors uniquement affaire de coûts, de main d’œuvre notamment, « d’overhead costs » et de prix d’achat chez les fournisseurs?

Ces approches fréquentes de la compétitivité comportent une part de vérité mais sont surtout au mieux limitantes et au pire erronées, au moins pour deux raisons:

  • La compétitivité n’est pas uniquement affaire de coûts. La compétitivité coût n’est qu’une de ses deux dimensions. L’autre est la compétitivité valeur, ce qui fait que la compétitivité est en fait affaire d’équilibre coût-valeur
  • Même si cela y contribue, la réduction des coûts ne se limite pas à contenir des taux horaires, à réduire des frais généraux ou à acheter moins cher

Elles sont de plus démenties par les nombreux exemples, dans le high-tech comme ailleurs, d’entreprises à la fois « compétitives » et profitables qui pratiquent des prix élevés en ayant mieux compris que d’autres ce qui « fait valeur’ pour le marché c’est à dire ce pour quoi les clients sont prêts à payer ou non.

Définir la compétitivité d’un produit ou d’une entreprise

Pour une produit, la compétitivité est le fait d’offrir au marché et aux clients un rapport prix-valeur qui emporte la préférence des clients tout en permettant de demeurer profitable.

Pour une entreprise c’est avoir un portefeuille de produits et d’offres compétitif.

Considérée de cette manière, la compétitivité impose de réfléchir non pas uniquement sur les coûts mais également sur la valeur proposée aux clients et sur le rapport entre coût et valeur.

Elle impose également de réfléchir séparément sur les coûts et sur les prix. Les mots de « compétitivité prix » souvent employés pour désigner la compétitivité coût sont à cet égard trompeurs car la compétitivité coût n’implique pas nécessairement une compétitivité prix, les deux étant de nature différente.

De quoi dépend la compétitivité?

Au niveau d’un produit ou d’une offre, elle dépend bien sûr de sa compétitivité coût. Mais celle ci ne provient pas uniquement des taux horaires, des coûts de structure ou des prix auxquels on achète:

  • Elle dépend fortement du coût induit par l’architecture technique des produits ou des systèmes, ainsi que des « effets volumes » provenant de la mutualisation de composants ou de « building blocks » entre produits ou entre projets. Ce point est affaire d’ingénierie produits
  • Elle dépend aussi du coût complet d’opération du produit tout au long de sa vie chez le client: installation, mise en service, formation, maintenance, destruction ou recyclage. Un produit peut être plus cher à l’achat mais être finalement très compétitif du fait d’un coût total de possession plus faible
  • Elle dépend enfin du coût des services éventuels que le client sera obligé d’acquérir en complément du produit lui-même

Mais elle dépend également de sa compétitivité valeur, c’est à dire de sa capacité à proposer les bonnes fonctions, performances techniques, services ou même image que les clients seront prêts à payer. Ce point est affaire de compréhension marketing des besoins clients

Au niveau d’une entreprise, sa compétitivité dépendra d’une part de sa capacité à créer des produits et des offres compétitifs et d’autre part de sa capacité à en maintenir la compétitivité au fil du temps.

Il est à noter que la compétitivité valeur est reliée à ce qu’on appelle parfois le « pricing power », c’est à dire de la capacité à faire payer par les clients la valeur proposée au juste prix pour être profitable. Ce point est en même temps affaire de valeur client, de promotion ou communication de la valeur et de capacité de négociation commerciale.

Contrôler la compétitivité et son maintien dans le temps

Comment contrôlera-t’on en pratique la compétitivité et son maintien dans le temps ?

  • Tout d’abord en introduisant la notion de « target price » dès le début des réflexions sur le concept du produit et son design technique
  • En procédant à des analyses détaillées de ce que les clients sont effectivement prêts à payer sur un segment de marché donné: fonctions, performances, modèle de revenu, services, image
  • Bien sûr en recherchant les architectures techniques permettant d’optimiser les coûts
  • Ensuite en recherchant systématiquement, même s’ils ne sont pas toujours possibles les effets d’abaissement des coûts par le volume donc par réutilisation d’un même élément dans plusieurs produits (ou projets)
  • En paramétrant et simulant les différentes hypothèses de coût en fonction des volumes globaux et des volumes de chaque élément mutualisable
  • En rendant le produit « serviceable » à moindre coût, ce qui ne voudra pas forcément dire à moindre prix
  • En travaillant collectivement le thème du « pricing power » non seulement du produit pris isolément mais de l’ensemble produit + services + modèle de transaction.

Un effort permanent

L’effort permanent de compétitivité se traduira dans les processus internes par deux types d’actions:

Un exercice de « business as usual » destiné à maintenir en permanence l’effort de compétitivité. Il s’agira d’une revue de la compétitivité de chaque produit et famille de produits, au minimum annuelle: cette revue ne portera pas uniquement sur les coûts mais sur la pertinence du rapport coût-valeur. Elle aboutira à des actions d’ajustement portant sur l’un ou l’autre des deux éléments.

Un exercice hors « business as usual » plutôt déclenché à la demande en fonction de situations particulières. Lorsqu’un handicap de compétitivité sera trop important pour trouver sa solution dans la revue annuelle, il s’agira alors de restructurer de complètement à la fois la valeur et les coûts du produit en réexaminant de fond en comble l’ensemble des aspects de compétitivité du produit: proposition de valeur, positionnement, prix, design technique, fournisseurs, etc. Ce type d’action pourra aboutir:

  • Soit à redéfinir complètement à la fois le positionnement et la proposition de valeur du produit, ainsi que son design technique, afin de lui faire retrouver une compétitivité acceptable
  • Soit à constater que le retour à la compétitivité n’est pas possible et à abandonner le produit
  • Soit à conserver le produit malgré son manque de compétitivité si le produit joue un rôle stratégique dans le portefeuille de produits (condition requise pour vendre un autre produit, maintien d’un contact terrain avec les opérations des clients, « gatekeeper » face à la concurrence, etc.)
Michel PERRIN

Diplômé d’HEC Paris Grande Ecole, Michel PERRIN a été directeur stratégie et marketing d’un grand groupe Européen de Logistique. Il a conçu et animé les programmes de formation sur-mesure en marketing B2B de l’Executive Education d’HEC pendant plus de 15 ans. Il dirige la société PI DEVELOPPEMENT qui conseille et forme les entreprises technologiques pour leur marketing et leur Politique Produits. Il est coresponsable de l'association Techno Marketing Academy et a créé le site Techno Marketing Training.fr

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